A l’occasion de la journée internationale des droits des femmes, ce vendredi 8 mars, le FC Lorient publiera différents articles et vidéos à ce sujet. Ce mardi, retrouvez le portrait de Caroline Cuissard, fondatrice du club.
Le 2 avril 1926, Jean Cuissard entre dans l’histoire en devenant le premier président du Football Club de Lorient. Si son nom et sa signature sont présents sur chaque papier officialisant les statuts du club qui vient d’être créé dans l’arrière-salle du café Eon, c’est pourtant sa femme, Caroline Cuissard, qui dirige le FCL d’une main de maître. Personnalité de l’ombre si l’on ne se fie qu’aux documents, elle est en réalité la femme qui a fondé le FC Lorient.
Comme un présage, Caroline naît sur une autre grande terre de football, à Saint-Etienne, le 6 juin 1882. Alors que sa mère Magdeleine est mareyeuse, son père Jacques troque sa rivelaine de mineur pour se convertir dans le commerce de poisson. La voie de Caroline semble alors tracée. Dès qu’elle en a la possibilité, elle prend la succession de son père et ouvre un étal de poisson aux halles de Saint-Etienne, accompagnée de Jean, avec qui elle s’est mariée à 16 ans. Mais lorsque leurs principaux fournisseurs, qui viennent de Lorient, ne trouvent pas de repreneur et demandent au couple Cuissard de leur succéder, celui-ci finit par accepter et décide de poser ses bagages à Keroman.
Désormais à Lorient et disposant d’un nouveau magasin de marée, Caroline en profite pour créer, avec son fils Joseph, l’armement Cuissard, au sein duquel plusieurs chalutiers commercent avec l’étranger. Si cette entreprise ne cesse de croître dans l’entre-deux-guerres, elle n’empêche pas Caroline de se consacrer à sa nouvelle passion : le football. En 1925, elle voit aboutir son projet d’établir une équipe corporative rassemblant des mareyeurs installés à l’Estacade. « La Marée Sportive » prend forme. Mais le désir de s’ouvrir au monde amateur ne tarde pas à se concrétiser. Un an plus tard, « La Marée Sportive » devient le « FC Lorient ».
Alors que l’intérêt pour ce nouveau sport au ballon rond est surtout porté par les hommes, Caroline fait figure de pionnière et d’exception. Elle est même l’une des grandes instigatrices de la réussite que connaît le FCL dès ses débuts, avec cinq championnats régionaux remportés avant la guerre. Rassembleuse, elle ne cache pas sa proximité avec ses joueurs, qu’elle considère comme ses « enfants ». Elle les réunit tous avant chaque match pour partager un bon repas. Par soucis d’économie, elle leur offre même des vieux filets de chalut en guise de filets de but et met à la disposition du club une propriété qu’elle possède au cœur de la ville.
Mais une femme peut en cacher une autre. Sa fille Charlotte est à l’origine du maillot à damiers et des couleurs tango et noires, adoptés par ceux qu’on surnomme désormais les Merlus. Sur le terrain, elle n’hésite pas non plus à mettre les gants lorsqu’aucun gardien n’est disponible. Pas la première des enfants Cuissard à œuvrer au sein du club, puisque l’aîné Joseph occupe le poste de président jusqu’à sa mort brutale en 1931.
Celle qui se fait appeler Madame Cuissard s’éteint le 11 février 1948, à l’âge de 65 ans. L’empreinte qu’elle laisse sur son club est immense. Mais son héritage est tout aussi impressionnant. En 1946, son petit-fils Antoine Cuissard revient jouer au FC Lorient pour aider le club à se reconstruire après la guerre. La même année, il devient International français (27 sélections, 1 but)… grâce à sa grand-mère qui lui convainc de passer le cap malgré son statut d’amateur. Quelques années plus tard, il est suivi par Yvon Goujon (11 sélections, 6 buts) et Yannick Stopyra (33 sélections, 1 but), respectivement petit-fils et arrière-petit-fils de Caroline Cuissard. Une véritable affaire de famille.